Revue T.E.S.S. n° 7 – mars 2004
Qui n’a pas eu l’impression un jour de perdre son temps dans une réunion ?
Quel est le taux de réunions efficientes dans votre organisation ?
Cette efficience se mesurant au ratio résultats / moyens mobilisés, il convient d’examiner les termes du rapport.
[*Moyens mobilisés ?*] chers, très cher souvent si l’on mesure la masse salariale immobilisée autour d’une table, le travail qui s’accumule pendant ce temps là et l’éviction physique de l’usager dans la plupart des réunions (le pire étant d’entendre qu’il faut revenir dans le service parce qu’ils sont ce matin tous en réunion…). Et lorsque la réunion intègre les bénéficiaires concernés, quelle place leur est réservée sinon celle de consommer passivement des informations ?
[*Résultats ?*] peu satisfaisants quand on ressort de la salle sans avoir pu exprimer son point de vue, sans avoir été enrichi par la confrontation des différentes perceptions ou l’intégration d’informations nouvelles. Très frustrant même lorsqu’on croyait avoir été invité à contribuer activement à l’élaboration d’une orientation voire d’une prise de décision et qu’on subit le monologue d’un leader… (cf. le record récent d’un leader syndical infligeant six heures d’exposé à son auditoire…).
La question fondamentale qui se pose donc dès la préparation d’une réunion se résume en fait à définir la finalité de l’assemblée que l’on va réunir : que doit-on produire ensemble ?
un simple transfert d’info ? (Est-ce alors nécessaire –depuis la diffusion des TIC- de réunir physiquement les auditeurs ?)
une analyse de situation capitalisant les éclairages des différents métiers ou postures concernées ? (As-t-on bien invité les bonnes personnes ?)
un recensement des solutions possibles pour remédier à un dysfonctionnent ou améliorer la qualité du service ? (La méthode d’animation autorise-t-elle la créativité nécessaire ?)
une élaboration et une répartition d’un plan d’actions à mettre en œuvre solidairement et de manière pérenne (Vérifie-t-on la compréhension et l’appropriation par chacun des décisions prises avant de se séparer ?)
D’autres objectifs peuvent être assignés à la réunion mais dans tous les cas, nous retrouvons l’impératif d’une distribution claire des trois fonctions de toute réunion.
[*La fonction de production*] clairement répartie entre les intervenants prévus et les autres membres en fonction du degré de participation souhaité et des buts (ne pas donner l’illusion par exemple de la concertation quand il s’agit d’une simple consultation…).
[*La fonction d’organisation*] prévoyant les différentes phases du déroulement, les méthodes de travail, les supports visuels, un cadre spatial et matériel adapté, une gestion du temps réaliste, la production d’un compte-rendu synthétique des conclusions, etc.
[*La fonction de régulation*] centrée sur les personnes et la création d’un climat de travail facilitant la mise en synergie des connaissances et des intelligences rassemblées -rôle incompatible avec un leadership sur le fond du débat. En effet, comment peut-on à la fois veiller à l’expression de chacun, faire respecter des méthodes de travail et vouloir simultanément convaincre l’auditoire ?
Nous pouvons encore observer en 2004 de grandes disparités dans l’utilisation de la réunion entre institutions voire entre directions à l’intérieur de la même organisation : ici, une caricature anachronique de pseudo-réunion où chacun perd son temps à faire semblant (rite occupationnel), là, un gaspillage d’énergie liée à la non-prise en compte des fonctions d’organisation ou de régulation (incompétence ou manipulation), et, juste à côté, une tranquille démonstration du fantastique levier d’évolution que représente la création d’un climat serein de confrontation et de valorisation des réflexions de chacun.
Cette diversité de pratiques s’étalonne encore entre deux abîmes : l’enlisement dans d’interminables palabres à la recherche d’une illusoire et chronophage unanimité et, à l’autre bout du plateau le vide sidéral créé par le délire d’un petit-chef sourd et aveugle. Ne pas oublier le cas de l’animateur inexpérimenté qui interdit une vigoureuse et salutaire confrontation par crainte d’avoir à gérer des conflits…
En résumé, quatre moyens simples d’améliorer la productivité d’une réunion : réduire la durée en salle au profit du temps de préparation / réduire le nombre d’invités aux personnes réellement concernées / instaurer une répartition des fonctions / solliciter la contribution active des participants…
Ah, oui aussi, vous avez déjà commencé à fuir ostensiblement les contre-exemples…
[/Henri Pérouze/]