Nous déplorons de plus en plus la difficulté -voire l’impossibilité- d’entrer en relation avec un interlocuteur physique dans nos démarches. Pour obtenir une carte grise, demander une information, présenter une réclamation, il faut saisir des codes, des identifiants et ensuite tenter de trouver son chemin digital … et si vous souhaitez exprimer votre besoin oralement, une voix robotisée vous propose une suite interminable de numéros à choisir ! Et ce n’est qu’un début puisque avec l’IA[1] la réponse dépendra exclusivement des interactions de milliers d’algorithmes puisant dans des montagnes de bigs datas…
Nos collectivités deviendront bientôt l’unique lieu d’épanchement d’un irrépressible besoin humain de contact et d’écoute. En interne, comment tentons-nous de préserver des espaces relationnels réels malgré l’emploi quasi systématique des outils de communication virtuelle ?
Notre management ne peut se limiter à la sécheresse des mails … et ne laisser place qu’aux ridicules émoticônes pour épancher ses émotions ! Nous observons mêmes des cadres obsédés par la rationalités des échanges développer fièrement une organisation du travail rigidifiée par l’application strictes de procédures à l’instar de ces entreprises qui contrôlent leurs employés par des systèmes experts numérisés imposant leurs consignes par casque et écrans portatifs. Ils ne manque plus que le reconnaissance faciale pour surveiller les comportements …
En externe, comment accueillerons-nous non seulement les « inadaptés » [2] mais aussi les citoyens résistants à la soumission aux logiques machinales, automatisées ?
Ils seront de plus en plus nombreux au fur et à mesure des « progrès » de la digitalisation du monde. Il ne s’agit pas bien sûr d’ouvrir un bureau des pleurs recueillant toutes les doléances et les frustrations des usagers souvent au-delà d’ailleurs des compétences propres de nos collectivités !
Devrons-nous pour autant sous-traiter à des officines privées le soin de recueillir les exclus et les réfractaires comme par exemple aujourd’hui pour obtenir une simple carte grise …
Comment associer les élus et le personnel à la prise en charge humaine de cette problématique de survie d’espace public humanisé ? Serons-nous condamnés -à l’instar de la création de réserves naturelles de biodiversité- à développer des refuges comme le deviennent les antennes de France Service ?
[1] cf. ChatGPT et autres « agents conversationnels » utilisant l’intelligence artificielle
[2] « Ce n’est pas un signe de bonne santé que d’être adapté à une société malade ! »
Jiddu Krishnamurti